On entend souvent dire que « islam » signifierait étymologiquement « paix » ce raccourci sous-entendant que l’islam est une religion prônant la paix puisque c’est là son véritable sens. La racine sémitique s.l.m a plusieurs dérivés en arabe qui ont des sens différents : salima signifie être conforme, être en sécurité ; salâm exprime la paix, la sérénité ; sallama véhicule quant à lui l’idée de rémission aussi bien dans le sens de s’en remettre à quelqu’un que de se constituer prisonnier ; et enfin aslama signifie se soumettre, faire allégeance. Le mot « islam » a pour origine aslama. Même si en arabe paix et soumission ont une racine commune, il s’agit de deux mots différents et « islam » provient de « soumission » et non de « paix ». Alfred-Louis de Prémare est enseignant chercheur à l’institut de recherches et d’études sur le monde arabo-musulman d’Aix-en-Provence. Dans l’extrait qui suit, il détaille le sens originel du terme « islam ». « “ Islâm ” fut dès le départ un terme équivoque. On avait tendance, naguère, à en occulter l’équivocité au profit d’un sens limité aux rapports de “ soumission individuelle ” que le croyant doit avoir à l’égard de Dieu. (…) À lire la littérature biographique autour de Muhammad et de ses compagnons, on en arrive à définir l’islam des origines de la façon suivante : c’est le ralliement ou la soumission à un pouvoir nouveau instauré par un prophète qui en définit les lois au nom de Dieu, et dont les assises politiques sont appuyées sur une action militaire permanente. C’est de cela que veulent rendre compte précisément les récits d’ “ Expéditions de l’Envoyé de Dieu ” (Maghâzî rasûl Allâh), noyau premier de l’écriture sur l’histoire des débuts de l’islam. »18 Le terme “ islam ” avait une double signification, il s’agissait d’une part d’une soumission individuelle à Dieu, mais aussi une soumission au pouvoir politique instauré par Mahomet au nom de Dieu. Pour le dire autrement la soumission n’est pas que spirituelle, il s’agit aussi d’une soumission « concrète » aux lois de Dieu, or ces lois exprimées dans le Coran et la sunna légifèrent aussi bien dans le domaine religieux que politique. Le terme « musulman » a d’ailleurs la même racine et signifie « soumis ». Un des propos les plus anciennement transmis que l’on ait du Prophète est le suivant : « J’ai reçu l’ordre de combattre les hommes jusqu’à ce qu’ils disent : “ Point de divinité excepté Allâh ”. Celui qui dit : “ Point de divinité excepté Allâh ” préserve de mon atteinte ses biens et sa personne. »19 Ceux qui reconnaissent Allah, ceux qui lui sont soumis seront en paix et n’auront pas à craindre le djihad. L’islam menace de guerre ceux qui refuse de se soumettre. Nous sommes très loin de ce raccourci étymologique qui impliquait que « islam » signifiait « paix ». Contrairement à ce que sous entendent de nombreux média, les djihadistes ne sont pas des illuminés analphabètes qui n’auraient jamais lu le Coran. Ils connaissent au contraire très bien leur Livre Saint auquel ils souhaitent se soumettre de manière totale, radicale, sans compromis, jusque dans la mort. Ils s’inscrivent dans la lignée du Prophète en poursuivant le combat inauguré par ce dernier pour soumettre le monde, de gré ou de force, aux lois d’Allah. La guerre sainte est un élément structurant de l’islam qui traverse de part en part le Coran comme la vie du Prophète.

Explications

18 DE PREMARE Alfred-Louis, Les fondations de l’islam, Paris, éditions du Seuil, 2002, pp.86-87. 19 Hadith (MUSLIM, Al-Sahîh, Imân,I, 200 sq. trad. Alfred-Louis de Prémare, Les fondations de l’islam, Paris, éditions du Seuil, 2002, p. 87.)